Suite à l’adoption du texte le 8 décembre dernier (08/12/2022), le vote en faveur du texte par le Parlement Européen (19/04/2023) puis son approbation par le Conseil de l’Europe (16/05/2023), Envol Vert revient sur la réglementation européenne de lutte contre la mise sur le marché de produits issus de la déforestation.
CE QU’IL FAUT RETENIR :
Envol Vert en lien avec la société civile restera vigilante quant à sa mise en œuvre effective et continuera ses actions de sensibilisation à la déforestation importée, et ses travaux autour d’outils de traçabilité.
De quoi parlons-nous avec la loi européenne de déforestation importée ?
A l’heure des grands défis, l’Union Européenne s’impose sur la scène internationale et signe un accord indispensable en matière de lutte contre la déforestation. Le 8 décembre dernier était adopté un texte visant à empêcher l’importation de produits ayant contribué à la destruction des écosystèmes forestiers sur le marché européen. Un petit pas pour l’Europe, un grand pas pour l’humanité ? Les forêts seront-elles épargnées par la voracité de notre consommation ? Envol Vert décrypte pour vous les subtilités de cette réglementation.
En 40 ans ce sont 420 millions d’hectares de forêt qui ont disparu selon la FAO ! Principale cause de cette destruction : l’agriculture commerciale (90%) qui alimente notre consommation quotidienne.
Face à ce constat l’Union Européenne s’engage et fixe un cadre réglementaire pour limiter sa participation dans la déforestation mondiale dont les importations de produits participent à hauteur de 16% à cette destruction.
Le texte approuvé le 8 décembre 2022 par l’Union Européenne dispose d’un objectif clair : obliger les entreprises à prouver que leurs produits importés et exportés de l’UE sont “zéro déforestation”. C’est-à-dire qu’aucune forêt n’a été déboisée ou dégradée après le 31 décembre 2020 pour la culture de matières premières à risque. L’accord cible sept produits de base (élevage bovin, bois, huile de palme, soja, café ,cacao et le caoutchouc) et certains de leurs produits dérivés (par exemple le cuir, le chocolat ou les meubles).
Les entreprises qui mettent sur le marché les marchandises concernées seront tenues d’établir et de mettre en œuvre un système de diligence raisonnée. Il aura pour but d’évaluer et d’atténuer le risque de déforestation au sein des chaînes d’approvisionnement. Concrètement, cela correspond à la vérification d’un certain nombre de critères (de déforestation, de dégradation et de respect des réglementations des pays producteurs) se basant sur une traçabilité allant jusqu’à la parcelle via sa géolocalisation (coordonnées GPS). Si certaines certifications existent déjà pour mettre en avant une production respectueuse de la forêt, celles-ci n’ont pas été considérées par la réglementation européenne comme suffisantes pour remplacer ce devoir de vigilance. Ceci est principalement expliqué par le manque d’efficacité avéré des certifications dans la lutte généralisée contre la déforestation.
Pour vérifier la diligence raisonnée des entreprises, les autorités compétentes de chaque pays de l’UE devront réaliser des contrôles sur les importations réalisées. Le taux de contrôle dépendra du risque de déforestation associé à chaque pays. En effet, les pays seront classés en 3 catégories selon le risque associé : faible (1% des produits seront contrôlés), moyen (3% des produits seront contrôlés) et élevé (9% des produits seront contrôlés). Des taux relativement faibles au vu de l’importance de la déforestation dans le dérèglement climatique et l’effondrement de la biodiversité .
Cette nouvelle réglementation constitue donc une étape clef dans la lutte contre la déforestation et la dégradation des écosystèmes, mais au vu de l’urgence dans laquelle se trouvent les forêts cette réglementation sera-t-elle suffisante ?
La réglementation a reporté la potentielle intégration de critères clefs pour la protection des écosystèmes et de la biodiversité dont l’inclusion des « autres terres boisés » (FAO, 2010). Ainsi, les tourbières ou savanes arborées, fortement menacées par l’expansion agricole, ne seront pas comprises dans ces restrictions alors même qu’elles remplissent des fonctions indispensables pour le climat et le maintien de l’équilibre écologique mondial. Il est également probable que leur non inclusion augmente la pression anthropique qu’elles subissent et que les importateur·rice·s y voient l’opportunité d’y déplacer leur zone de production pour échapper à la réglementation européenne. Cet effet de fuite peut avoir des conséquences terribles, notamment sur certains territoires comme le Cerrado (Brésil) déjà fortement impacté par la production de soja.
Cette savane, principalement située au Brésil, abrite environ 5% de la biodiversité terrestre et a été fortement détruite ces dernières années. Il ne reste plus que 20% de sa surface initiale et son taux de déforestation n’a fait qu’augmenter depuis 2015, atteignant un total de 10 700 km carré détruits en 2022.
Le territoire du Cerrado dévasté par l’agriculture intensive ©WWF
Cerrado brésilien non impacté
©Getty Image
Pour qu’un produit soit importé sur le marché européen les entreprises doivent démontrer le respect des droits humains. Malheureusement, cette condition prend uniquement en compte les normes nationales en vigueur dans les pays de production potentiellement moins restrictives que des standards internationaux, notamment pour les peuples autochtones ou les activistes environnementaux. Une omission qui a un impact direct sur la déforestation. En 2021, la FAO pointait dans un rapport que la déforestation est moindre dans les territoires autochtones dont les titres de propriétés sont garantis (jusqu’à 2,5 fois moins au Brésil).
Dans les forêts gérées par des peuples autochtones dont les droits de propriété sont garantis, et comparativement aux autres forêts, le taux de déforestation était 2,8 fois plus faible en Bolivie, 2,5 plus faible au Brésil et 2 fois plus faible en Colombie.
Les territoires des peuples autochtones subissent une pression continue liée à la demande croissante en produits d’importations. En effet, certains peuples autochtones et autres défenseur·seuse·s de la forêt se retrouvent souvent dans un rapport de force inégal face à des acteurs motivés par des aspects uniquement financiers. Par exemple, des entreprises agro industrielles uniquement intéressées par leurs résultats économiques ou des agriculteurs démunis dont les marges sont si faibles que seule l’augmentation de la surface agricole peut les sortir de la précarité. Cette pression est difficile à gérer, notamment dans les pays où les intérêts privés sont intrinsèquement liés aux gouvernements en place. Une des solutions serait que la réglementation impose aux entreprises que les produits mis sur le marché européen respectent les standards internationaux de droits humains.
Au Brésil sous le mandat de Jair Bolsonaro, les droits des peuples autochtones ont été complètement bafoués. Les lois nationales étants insuffisantes, l’APIB ‘Associacion do Povos Indigenas do Brasil” a déposé plainte devant la cour pénale internationale.
La réglementation brésilienne a heureusement évolué grâce à l’élection de Lula da Silva. Or, si la réglementation défaillante de Jair Bolsonaro était toujours en place, elle aurait été considérée comme suffisante pour garantir le respect des droits humains pour les produits importés dans l’Union Européenne.
Mobilisation des peuples autochtones devant la cour pénale international pour dénoncer l’ex-président Jair Bolsonaro ©APIB
Une politique pour se dédouaner ?
Malgré le bon signal envoyé par le premier vote au niveau Européen le 8 décembre dernier, cette réglementation européenne laisse planer le doute sur son efficacité à long terme et l’impact concret qu’elle aura sur la déforestation.
En effet, le texte prévoit d’obliger les entreprises à connaître l’origine de leurs produits importés en UE pour garantir qu’ils soient « zéro déforestation », mais rien n’empêchera leur commercialisation en dehors de l’Union Européenne. Ainsi, la réglementation ne vise qu’à nettoyer les chaînes d’approvisionnements vers l’Europe et non les chaînes de production dans leur ensemble. Une option ambitieuse aurait été de coupler aux demandes de vigilances actuelles une vérification de la déforestation sur l’ensemble des activités des fournisseurs et pas seulement sur les produits exportés vers l’UE.
Pour répondre en partie à cette problématique, le nouveau règlement sera mis en œuvre avec d’autres mesures, parmi lesquelles le soutien aux pays producteurs. La Commission propose ainsi d’appuyer financièrement les pays partenaires afin d’améliorer la gestion des forêts et créer des opportunités socio-économiques durables pour les populations, notamment via des chaînes de valeurs durables . Elle s’est notamment engagée à verser 1 milliard d’euros pour la protection, la restauration et la gestion durable des forêts dans les pays partenaires, dans l’intérêt des populations, du climat et de l’environnement. Ainsi l’Europe, au lieu de lutter concrètement contre la déforestation en concertation avec les pays producteurs, se dédouane en laissant la responsabilité du changement des pratiques à long terme aux organismes de coopération internationale. #Greenwashing
Finalement la grande imposture de cette réglementation reste le choix d’une date de référence au 31 Décembre 2020. En effet, par ce simple choix, l’Union Européenne considère que toute la déforestation et dégradation ayant eu lieu avant cette date est difficilement mesurable et qu’elle ne peut pas être prise en compte. En choisissant cette date, non seulement elle n’assume pas sa responsabilité ancestrale dans cette destruction, mais elle ignore aussi toutes les initiatives ayant vu le jour dans d’autres pays. Notamment, les moratoires sur le soja en Amazonie existant depuis 2009 et ceux sur l’huile de palme en Asie du sud-est (ex : 2018 avec la RSPO).
Comme demandé par la nouvelle réglementation européenne, les entreprises doivent être en capacité de fournir l’origine exacte des produits importés. Bien que les solutions de traçabilité existent techniquement, elles varient en fonction des matières premières et sont parfois lourdes, coûteuses et complexes à mettre en place. Certains producteurs se trouvent dans des zones isolées, sans connaissances techniques adaptées, ni capacités de mise en œuvre. Il est donc indispensable que ce soit les entreprises en bout de chaîne d’approvisionnement qui mettent en place les systèmes de traçabilité et non les petits producteurs ou les consommateurs.
Les actions d’Envol Vert en la matière !
Depuis 2018 Envol Vert travaille sur le sujet de la déforestation importée et a développé de nombreux outils et projets qui attestent des opportunités concrètes à mettre en place sur le terrain (clique ci-dessous pour en savoir plus).
Conclusion : Un besoin de vigilance accrue
La loi européenne sur la déforestation importée est une bonne avancée mais, sans application concrète et ambitieuse, notamment au niveau des processus de contrôle et des sanctions associées, celle-ci restera une simple coquille vide. En plus de pousser, lors des prochaines révisions de la réglementation, pour l’inclusion des autres terres boisées et pour la prise en compte des standards internationaux de respect des droits humains, il est important de demander que les informations relatives à la traçabilité des produits soient totalement transparentes. En effet, à ce jour seules les autorités compétentes sont habilitées à contrôler les entreprises et disposent donc des informations récoltées. Cela limite grandement le travail des lanceurs d’alertes et laisse les consommateur·rices dans l’ignorance.
Finalement, il faut aussi élargir le périmètre de cette réglementation pour inclure d’autres produits à risque mais aussi d’autres acteur·rice·s comme celle·ux du secteur financier qui détiennent un pouvoir de levier important.
Envol Vert en lien avec la société civile restera vigilante quant à sa mise en œuvre effective et continuera ses actions de sensibilisation à la déforestation importée.
Suite à l’adoption du texte le 8 décembre dernier (08/12/2022), le vote en faveur du texte par le Parlement Européen (19/04/2023) puis son approbation par le Conseil de l’Europe (16/05/2023), Envol Vert revient sur la réglementation européenne de lutte contre la mise sur le marché de produits issus de la déforestation.
CE QU’IL FAUT RETENIR :
Envol Vert en lien avec la société civile restera vigilante quant à sa mise en œuvre effective et continuera ses actions de sensibilisation à la déforestation importée, et ses travaux autour d’outils de traçabilité.
De quoi parlons-nous avec la loi européenne de déforestation importée ?
A l’heure des grands défis, l’Union Européenne s’impose sur la scène internationale et signe un accord indispensable en matière de lutte contre la déforestation. Le 8 décembre dernier était adopté un texte visant à empêcher l’importation de produits ayant contribué à la destruction des écosystèmes forestiers sur le marché européen. Un petit pas pour l’Europe, un grand pas pour l’humanité ? Les forêts seront-elles épargnées par la voracité de notre consommation ? Envol Vert décrypte pour vous les subtilités de cette réglementation.
En 40 ans ce sont 420 millions d’hectares de forêt qui ont disparu selon la FAO ! Principale cause de cette destruction : l’agriculture commerciale (90%) qui alimente notre consommation quotidienne.
Face à ce constat l’Union Européenne s’engage et fixe un cadre réglementaire pour limiter sa participation dans la déforestation mondiale dont les importations de produits participent à hauteur de 16% à cette destruction.
Le texte approuvé le 8 décembre 2022 par l’Union Européenne dispose d’un objectif clair : obliger les entreprises à prouver que leurs produits importés et exportés de l’UE sont “zéro déforestation”. C’est-à-dire qu’aucune forêt n’a été déboisée ou dégradée après le 31 décembre 2020 pour la culture de matières premières à risque. L’accord cible sept produits de base (élevage bovin, bois, huile de palme, soja, café ,cacao et le caoutchouc) et certains de leurs produits dérivés (par exemple le cuir, le chocolat ou les meubles).
Les entreprises qui mettent sur le marché les marchandises concernées seront tenues d’établir et de mettre en œuvre un système de diligence raisonnée. Il aura pour but d’évaluer et d’atténuer le risque de déforestation au sein des chaînes d’approvisionnement. Concrètement, cela correspond à la vérification d’un certain nombre de critères (de déforestation, de dégradation et de respect des réglementations des pays producteurs) se basant sur une traçabilité allant jusqu’à la parcelle via sa géolocalisation (coordonnées GPS). Si certaines certifications existent déjà pour mettre en avant une production respectueuse de la forêt, celles-ci n’ont pas été considérées par la réglementation européenne comme suffisantes pour remplacer ce devoir de vigilance. Ceci est principalement expliqué par le manque d’efficacité avéré des certifications dans la lutte généralisée contre la déforestation.
Pour vérifier la diligence raisonnée des entreprises, les autorités compétentes de chaque pays de l’UE devront réaliser des contrôles sur les importations réalisées. Le taux de contrôle dépendra du risque de déforestation associé à chaque pays. En effet, les pays seront classés en 3 catégories selon le risque associé : faible (1% des produits seront contrôlés), moyen (3% des produits seront contrôlés) et élevé (9% des produits seront contrôlés). Des taux relativement faibles au vu de l’importance de la déforestation dans le dérèglement climatique et l’effondrement de la biodiversité .
Cette nouvelle réglementation constitue donc une étape clef dans la lutte contre la déforestation et la dégradation des écosystèmes, mais au vu de l’urgence dans laquelle se trouvent les forêts cette réglementation sera-t-elle suffisante ?
La réglementation a reporté la potentielle intégration de critères clefs pour la protection des écosystèmes et de la biodiversité dont l’inclusion des « autres terres boisés » (FAO, 2010). Ainsi, les tourbières ou savanes arborées, fortement menacées par l’expansion agricole, ne seront pas comprises dans ces restrictions alors même qu’elles remplissent des fonctions indispensables pour le climat et le maintien de l’équilibre écologique mondial. Il est également probable que leur non inclusion augmente la pression anthropique qu’elles subissent et que les importateur·rice·s y voient l’opportunité d’y déplacer leur zone de production pour échapper à la réglementation européenne. Cet effet de fuite peut avoir des conséquences terribles, notamment sur certains territoires comme le Cerrado (Brésil) déjà fortement impacté par la production de soja.
Cette savane, principalement située au Brésil, abrite environ 5% de la biodiversité terrestre et a été fortement détruite ces dernières années. Il ne reste plus que 20% de sa surface initiale et son taux de déforestation n’a fait qu’augmenter depuis 2015, atteignant un total de 10 700 km carré détruits en 2022.
Le territoire du Cerrado dévasté par l’agriculture intensive ©WWF
Cerrado brésilien non impacté
©Getty Image
Pour qu’un produit soit importé sur le marché européen les entreprises doivent démontrer le respect des droits humains. Malheureusement, cette condition prend uniquement en compte les normes nationales en vigueur dans les pays de production potentiellement moins restrictives que des standards internationaux, notamment pour les peuples autochtones ou les activistes environnementaux. Une omission qui a un impact direct sur la déforestation. En 2021, la FAO pointait dans un rapport que la déforestation est moindre dans les territoires autochtones dont les titres de propriétés sont garantis (jusqu’à 2,5 fois moins au Brésil).
Dans les forêts gérées par des peuples autochtones dont les droits de propriété sont garantis, et comparativement aux autres forêts, le taux de déforestation était 2,8 fois plus faible en Bolivie, 2,5 plus faible au Brésil et 2 fois plus faible en Colombie.
Les territoires des peuples autochtones subissent une pression continue liée à la demande croissante en produits d’importations. En effet, certains peuples autochtones et autres défenseur·seuse·s de la forêt se retrouvent souvent dans un rapport de force inégal face à des acteurs motivés par des aspects uniquement financiers. Par exemple, des entreprises agro industrielles uniquement intéressées par leurs résultats économiques ou des agriculteurs démunis dont les marges sont si faibles que seule l’augmentation de la surface agricole peut les sortir de la précarité. Cette pression est difficile à gérer, notamment dans les pays où les intérêts privés sont intrinsèquement liés aux gouvernements en place. Une des solutions serait que la réglementation impose aux entreprises que les produits mis sur le marché européen respectent les standards internationaux de droits humains.
Au Brésil sous le mandat de Jair Bolsonaro, les droits des peuples autochtones ont été complètement bafoués. Les lois nationales étants insuffisantes, l’APIB ‘Associacion do Povos Indigenas do Brasil” a déposé plainte devant la cour pénale internationale.
La réglementation brésilienne a heureusement évolué grâce à l’élection de Lula da Silva. Or, si la réglementation défaillante de Jair Bolsonaro était toujours en place, elle aurait été considérée comme suffisante pour garantir le respect des droits humains pour les produits importés dans l’Union Européenne.
Mobilisation des peuples autochtones devant la cour pénale international pour dénoncer l’ex-président Jair Bolsonaro ©APIB
Une politique pour se dédouaner ?
Malgré le bon signal envoyé par le premier vote au niveau Européen le 8 décembre dernier, cette réglementation européenne laisse planer le doute sur son efficacité à long terme et l’impact concret qu’elle aura sur la déforestation.
En effet, le texte prévoit d’obliger les entreprises à connaître l’origine de leurs produits importés en UE pour garantir qu’ils soient « zéro déforestation », mais rien n’empêchera leur commercialisation en dehors de l’Union Européenne. Ainsi, la réglementation ne vise qu’à nettoyer les chaînes d’approvisionnements vers l’Europe et non les chaînes de production dans leur ensemble. Une option ambitieuse aurait été de coupler aux demandes de vigilances actuelles une vérification de la déforestation sur l’ensemble des activités des fournisseurs et pas seulement sur les produits exportés vers l’UE.
Pour répondre en partie à cette problématique, le nouveau règlement sera mis en œuvre avec d’autres mesures, parmi lesquelles le soutien aux pays producteurs. La Commission propose ainsi d’appuyer financièrement les pays partenaires afin d’améliorer la gestion des forêts et créer des opportunités socio-économiques durables pour les populations, notamment via des chaînes de valeurs durables . Elle s’est notamment engagée à verser 1 milliard d’euros pour la protection, la restauration et la gestion durable des forêts dans les pays partenaires, dans l’intérêt des populations, du climat et de l’environnement. Ainsi l’Europe, au lieu de lutter concrètement contre la déforestation en concertation avec les pays producteurs, se dédouane en laissant la responsabilité du changement des pratiques à long terme aux organismes de coopération internationale. #Greenwashing
Finalement la grande imposture de cette réglementation reste le choix d’une date de référence au 31 Décembre 2020. En effet, par ce simple choix, l’Union Européenne considère que toute la déforestation et dégradation ayant eu lieu avant cette date est difficilement mesurable et qu’elle ne peut pas être prise en compte. En choisissant cette date, non seulement elle n’assume pas sa responsabilité ancestrale dans cette destruction, mais elle ignore aussi toutes les initiatives ayant vu le jour dans d’autres pays. Notamment, les moratoires sur le soja en Amazonie existant depuis 2009 et ceux sur l’huile de palme en Asie du sud-est (ex : 2018 avec la RSPO).
Comme demandé par la nouvelle réglementation européenne, les entreprises doivent être en capacité de fournir l’origine exacte des produits importés. Bien que les solutions de traçabilité existent techniquement, elles varient en fonction des matières premières et sont parfois lourdes, coûteuses et complexes à mettre en place. Certains producteurs se trouvent dans des zones isolées, sans connaissances techniques adaptées, ni capacités de mise en œuvre. Il est donc indispensable que ce soit les entreprises en bout de chaîne d’approvisionnement qui mettent en place les systèmes de traçabilité et non les petits producteurs ou les consommateurs.
Les actions d’Envol Vert en la matière !
Depuis 2018 Envol Vert travaille sur le sujet de la déforestation importée et a développé de nombreux outils et projets qui attestent des opportunités concrètes à mettre en place sur le terrain (clique ci-dessous pour en savoir plus).
Conclusion : Un besoin de vigilance accrue
La loi européenne sur la déforestation importée est une bonne avancée mais, sans application concrète et ambitieuse, notamment au niveau des processus de contrôle et des sanctions associées, celle-ci restera une simple coquille vide. En plus de pousser, lors des prochaines révisions de la réglementation, pour l’inclusion des autres terres boisées et pour la prise en compte des standards internationaux de respect des droits humains, il est important de demander que les informations relatives à la traçabilité des produits soient totalement transparentes. En effet, à ce jour seules les autorités compétentes sont habilitées à contrôler les entreprises et disposent donc des informations récoltées. Cela limite grandement le travail des lanceurs d’alertes et laisse les consommateur·rices dans l’ignorance.
Finalement, il faut aussi élargir le périmètre de cette réglementation pour inclure d’autres produits à risque mais aussi d’autres acteur·rice·s comme celle·ux du secteur financier qui détiennent un pouvoir de levier important.
Envol Vert en lien avec la société civile restera vigilante quant à sa mise en œuvre effective et continuera ses actions de sensibilisation à la déforestation importée.